Médicaments Anticholinergiques : Risque Élevé de Démence Dévoilé

Une étude historique a établi un lien inquiétant entre l’utilisation à long terme de certains médicaments anticholinergiques et un risque accru de démence plus tard dans la vie. Cette recherche est considérée comme l’une des plus importantes et détaillées à ce jour sur le sujet.

Femme regardant des pilules avec inquiétude

Les anticholinergiques, qui bloquent un neurotransmetteur clé, l’acétylcholine, jouent un rôle crucial dans la transmission des signaux cérébraux pour le contrôle musculaire. Ils sont couramment prescrits pour diverses conditions, allant de la maladie de Parkinson et des troubles urinaires à l’asthme, à la BPCO et à la dépression.

Des médicaments comme l’amitriptyline, la dosulepin et la paroxétine, utilisés pour traiter la dépression, ont déjà été associés à une augmentation du risque de démence, même lorsqu’ils sont pris jusqu’à 20 ans auparavant. D’autres recherches suggèrent également qu’une utilisation généralisée de tout anticholinergique pourrait être liée à un risque accru de démence.

Utilisation à Long Terme de Certains Anticholinergiques

La récente étude, menée par l’Université d’East Anglia (UEA) au Royaume-Uni, a révélé que l’utilisation prolongée de certains anticholinergiques est spécifiquement liée à un risque accru de démence. Elle confirme le lien établi pour les médicaments utilisés dans le traitement de la dépression, ainsi que pour ceux destinés à la maladie de Parkinson (comme la procyclidine) et aux troubles urinaires (tels que l’oxybutynine, la solifénacine et la toltérodine).

Cependant, l’étude n’a pas trouvé de lien significatif entre l’utilisation de certains autres anticholinergiques, comme les antihistaminiques et les médicaments pour les crampes abdominales, et un risque accru de démence.

Pour leur enquête, les chercheurs ont exploité les données de la Clinical Practice Research Database, qui contient des enregistrements anonymisés pour plus de 11 millions de personnes au Royaume-Uni.

Charge Cognitive Anticholinergique

L’échantillon de l’étude comprenait 40 770 patients âgés de 65 à 99 ans, diagnostiqués avec une démence entre 2006 et 2015. Chaque patient a été apparié à sept témoins du même âge et sexe, n’ayant pas de démence.

Les chercheurs ont utilisé une échelle appelée échelle cognitive anticholinergique (ACB) pour évaluer l’impact des médicaments prescrits. Un score ACB de 1 indique un médicament «potentiellement anticholinergique», tandis qu’un score de 2 ou 3 signifie qu’il est «définitivement anticholinergique». Ils ont analysé plus de 27 millions d’ordonnances dans ce cadre.

L’analyse a révélé que 35 % des patients atteints de démence et 30 % des témoins avaient reçu au moins un médicament avec un score de 3 sur l’échelle ACB dans les 4 à 20 ans précédant le diagnostic.

Une analyse plus approfondie a montré que les médicaments ayant un score ACB de 3, prescrits pour la dépression, la maladie de Parkinson et les troubles urinaires, étaient liés à un risque plus élevé de démence, et ce jusqu’à 20 ans après l’exposition. En revanche, aucun lien n’a été établi pour les médicaments avec un score ACB de 1 ou pour certains médicaments respiratoires et gastro-intestinaux ayant obtenu un score de 3.

Les Cliniciens Devraient Être Vigilants

Les auteurs de l’étude précisent que, malgré leurs résultats, ils ne peuvent pas établir une relation de cause à effet directe entre les anticholinergiques et la démence. Il est possible que les personnes prenant ces médicaments soient déjà aux stades précoces de la démence.

Cependant, puisque le lien persiste même lorsque l’exposition a eu lieu 15 à 20 ans avant le diagnostic, les chercheurs soutiennent que « la causalité inverse ou la confusion avec les premiers symptômes de la démence sont des explications moins probables ». Ils recommandent aux cliniciens de rester attentifs à l’utilisation de ces médicaments et de bien évaluer les risques par rapport aux bénéfices.

Importance de la Recherche

La démence touche environ 50 millions de personnes dans le monde, et chaque année, 10 millions de nouveaux cas sont diagnostiqués, entraînant une perte progressive de la mémoire, de la capacité à réfléchir et de l’autonomie.

«Cette recherche est d’une importance cruciale», déclare le Dr George Savva, responsable de l’étude à l’École des sciences de la santé de l’UEA. «On estime que 350 millions de personnes souffrent de dépression à l’échelle mondiale, représentant plus de 13 % des hommes et 30 % des femmes au Royaume-Uni et aux États-Unis.»

«De nombreuses options de traitement pour ces conditions impliquent des médicaments ayant des effets anticholinergiques», ajoute-t-il. «Il est donc primordial de développer des stratégies pour prévenir la démence.»

Dans un article éditorial associé à l’étude, le professeur Shelly Gray de l’Université de Washington et le professeur Joseph Hanlon de l’Université de Pittsburgh soulignent que les auteurs ont brillamment abordé la question de la meilleure manière de «résumer le fardeau anticholinergique pour les recherches futures».

Ils conviennent également que, dans l’intervalle, «comme le suggèrent les lignes directrices, les anticholinergiques devraient généralement être évités chez les adultes plus âgés.

Nouvelles Perspectives sur les Anticholinergiques (2024)

En 2024, de nouvelles recherches mettent en lumière l’importance d’une évaluation rigoureuse des prescriptions anticholinergiques. Des études récentes montrent que la prise de conscience des effets à long terme de ces médicaments est plus cruciale que jamais. Les cliniciens sont encouragés à réévaluer les traitements prescrits, surtout chez les patients âgés, afin de minimiser les risques potentiels de démence.

De plus, des données émergentes indiquent que des alternatives non anticholinergiques pourraient offrir des bénéfices similaires pour traiter des conditions comme l’anxiété et la dépression, sans le risque associé de démence. Cela souligne l’importance de personnaliser les traitements en tenant compte des antécédents médicaux des patients et des risques potentiels.

Il est également essentiel d’informer les patients sur les effets secondaires possibles des médicaments qu’ils prennent, renforçant ainsi la nécessité d’une communication ouverte entre médecins et patients. Une approche collaborative dans la gestion des traitements pourrait conduire à des résultats plus positifs pour la santé cognitive des patients à long terme.

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