Après avoir étudié les cellules immunitaires prélevées sur les articulations des personnes atteintes de polyarthrite rhumatoïde, les scientifiques ont découvert qu’une fois que la maladie s’est installée, certains types de cellules perdent leur sensibilité à la vitamine D.
L’équipe, composée de chercheurs de l’University College London et de l’Université de Birmingham, tous deux au Royaume-Uni, rapporte ces nouvelles découvertes avec un regard neuf sur l’impact de la vitamine D dans le cadre de la polyarthrite rhumatoïde.
La polyarthrite rhumatoïde est une maladie auto-immune qui se manifeste lorsque le système immunitaire attaque par erreur les tissus sains, principalement les articulations, entraînant inflammation douloureuse et gonflement. Cette affection touche souvent plusieurs articulations simultanément, notamment les genoux, les mains et les poignets. Elle enflamme la membrane synoviale, ce qui peut endommager l’articulation elle-même, entraînant des douleurs persistantes, des problèmes d’équilibre et des déformations visibles.
Selon les estimations, environ 1 % de la population mondiale souffre de polyarthrite rhumatoïde, affectant environ 1,3 million d’adultes aux États-Unis. Cette maladie touche plus fréquemment les femmes que les hommes, soulevant ainsi des questions sur l’influence de facteurs hormonaux.
L’étude a examiné des cellules provenant d’articulations enflammées
Dans leur article, les chercheurs soulignent que des études antérieures ont montré que la vitamine D possède des « effets anti-inflammatoires puissants », notamment sa capacité à inhiber l’activité de certains types de lymphocytes T impliqués dans la polyarthrite rhumatoïde. Toutefois, ces études avaient examiné uniquement des cellules immunitaires isolées du sang, laissant ainsi flou l’impact de la vitamine D sur les cellules immunitaires directement au site de la maladie.
Un aspect crucial de cette nouvelle étude est qu’elle représente la première enquête à utiliser des cellules immunitaires prélevées à la fois dans le sang et dans les articulations enflammées de patients souffrant de polyarthrite rhumatoïde.
« Contrairement aux recherches précédentes », explique Karim Raza, professeur à l’Institution of Inflammation and Aging de l’Université de Birmingham, « nous avons isolé différents types de cellules immunitaires directement sur le site de la maladie pour déterminer si des sous-ensembles spécifiques de cellules T possédaient une sensibilité identique à la vitamine D. »
Les cellules immunitaires ont perdu leur sensibilité à la vitamine D
Pour cette étude, les scientifiques ont analysé des échantillons de liquide synovial prélevés sur les articulations de 15 personnes atteintes de polyarthrite rhumatoïde, âgées de 40 à 85 ans. Le liquide synovial, épais et collant, agit comme lubrifiant pour réduire les frictions entre les articulations.
Ils ont également examiné des échantillons de sang provenant de patients atteints de polyarthrite rhumatoïde et de témoins appariés en âge et en sexe, n’ayant pas cette maladie.
Lorsqu’ils ont testé la réaction des cellules immunitaires dans les différents échantillons à la vitamine D, ils ont constaté que certains types de cellules réagissaient de manière différente.
En particulier, il a été observé que certains lymphocytes T prélevés sur des articulations enflammées étaient moins sensibles aux effets anti-inflammatoires de la vitamine D comparativement à ceux isolés dans le sang des mêmes patients.
Martin Hewison, professeur à l’Institute of Metabolism and Systems Research de l’Université de Birmingham, explique : « Cela semble être dû au fait que les cellules immunitaires des articulations des patients souffrant de polyarthrite rhumatoïde sont davantage sensibles à l’inflammation, ce qui les rend moins susceptibles de réagir, même si elles possèdent tous les mécanismes pour répondre à la vitamine D. »
La vitamine D peut-elle prévenir la polyarthrite rhumatoïde?
Bien que l’étude se soit limitée à l’exploration de cellules en laboratoire, les résultats semblent suggérer que le maintien de niveaux adéquats de vitamine D pourrait jouer un rôle dans la prévention de l’arthrite rhumatoïde et d’autres maladies inflammatoires.
Cependant, les chercheurs soulignent que la simple prise de suppléments de vitamine D pourrait ne pas aider les personnes déjà atteintes de polyarthrite rhumatoïde, car leurs cellules immunitaires sont déjà désensibilisées.
« Au lieu de cela », note Louisa Jeffery, co-auteur également de l’Université de Birmingham, « des doses beaucoup plus élevées de vitamine D pourraient être nécessaires, ou même un nouveau traitement visant à contourner ou corriger l’insensibilité des cellules immunitaires à la vitamine D. »
Les chercheurs envisagent de poursuivre leurs investigations pour comprendre pourquoi la polyarthrite rhumatoïde induit une désensibilisation des cellules immunitaires à la vitamine D et comment ce phénomène pourrait être évité. Ils souhaitent également explorer si des effets similaires se manifestent dans d’autres pathologies inflammatoires.
« Nos résultats étaient inattendus, car nous pensions initialement que les cellules provenant de l’articulation rhumatoïde enflammée réagiraient aussi bien à la vitamine D que celles issues du sang », conclut le professeur Karim Raza.
Perspectives et Recherches Futures
En somme, ces découvertes ouvrent la voie à de futures recherches sur l’importance cruciale de la vitamine D dans le cadre de la gestion de l’arthrite rhumatoïde. Des études récentes ont souligné le lien entre les niveaux de vitamine D et la sévérité des symptômes chez les patients, suggérant qu’une supplémentation pourrait avoir des effets bénéfiques.
De plus, une enquête menée en 2023 a révélé que des taux de vitamine D plus élevés étaient associés à une diminution de l’inflammation articulaire, renforçant l’idée que cette vitamine pourrait jouer un rôle crucial dans la modulation de la réponse immunitaire.
Les chercheurs encouragent donc une évaluation plus approfondie des traitements basés sur la vitamine D, en particulier des études randomisées contrôlées pour déterminer l’efficacité de différentes doses et formulations. Il est essentiel d’explorer comment la vitamine D peut être intégrée dans des protocoles de traitement existants pour améliorer la qualité de vie des patients souffrant d’arthrite rhumatoïde.