L’empathie et la générosité qu’elle suscite sont des traits humains essentiels. Bien que les scientifiques aient étudié ces comportements en profondeur, les mécanismes neuraux sous-jacents ne sont toujours pas complètement compris. La recherche de rupture donne de nouveaux indices.
Les humains sont des animaux complexes vivant dans un environnement complexe. Chaque jour, notre cerveau prend des milliers de décisions, nous aidant à naviguer dans les défis sociaux.
Parfois, nous agissons pour notre propre bénéfice; d’autres fois, nous choisissons d’aider autrui. Cette dichotomie est fascinante et essentielle à notre survie en tant qu’espèce sociale.
En effet, les humains ont évolué pour devenir des êtres sociaux. Dans les groupes, ceux qui n’agissent que par intérêt personnel ne peuvent pas prospérer. En plus de la survie individuelle, il est crucial d’agir avec générosité envers les autres.
La générosité implique de saisir les besoins des autres; c’est là que l’empathie entre en jeu — la capacité de se mettre à la place d’un autre. Être capable d’éprouver de l’empathie et d’agir en conséquence est donc fondamental pour notre humanité.
Cependant, certaines personnes, comme celles souffrant de psychopathie ou d’autres troubles de la personnalité, n’ont pas cette capacité innée ni ce désir d’aider autrui.
Comprendre le comportement prosocial
Récemment, des chercheurs de l’Université d’Oxford, au Royaume-Uni, ont décidé d’approfondir la compréhension actuelle des comportements soi-disant prosociaux en étudiant l’origine neurologique de l’empathie et de la générosité.
Dr. Patricia Lockwood a publié ses travaux cette semaine dans une revue scientifique de premier plan.
« Bien que les gens aient une tendance remarquable à adopter des comportements prosociaux, il existe des différences substantielles entre les individus. L’empathie, cette capacité à ressentir et comprendre indirectement les émotions d’autrui, est souvent présentée comme une motivation essentielle des comportements prosociaux. Nous voulions explorer pourquoi et comment ces comportements peuvent être liés, » explique Dr. Lockwood.
Pour étudier ce trait humain, les chercheurs ont utilisé une IRM fonctionnelle pour scanner les participants pendant qu’ils effectuaient des tâches. Ces tâches étaient basées sur des modèles éprouvés qui testent comment les gens apprennent à en tirer profit. Les participants devaient déterminer quels symboles leur permettraient d’obtenir la plus grande récompense.
En variante de l’expérience classique, les participants devaient également apprendre quels symboles étaient susceptibles de donner une récompense à autrui.
Peut-être sans grande surprise, les résultats ont montré que les individus apprenaient à bénéficier eux-mêmes plus rapidement qu’ils n’apprenaient à aider les autres. De plus, grâce à l’IRM, l’équipe a identifié la zone du cerveau activée lors d’actions aidant autrui.
Le cortex cingulaire antérieur subgénéral
Le cortex cingulaire antérieur (ACC) est une région du cerveau reconnue pour son rôle dans le contrôle de divers processus automatiques, tels que la régulation de la pression artérielle et de la fréquence cardiaque. On pense aussi qu’il joue un rôle crucial dans des fonctions cognitives supérieures, y compris l’anticipation de la récompense, le contrôle des impulsions, la prise de décision et la gestion des émotions.
Lorsque les participants apprenaient à aider autrui, une partie spécifique de l’ACC, le cortex cingulaire antérieur subgénéral (sgACC), était activée. Cette région était la seule à s’illuminer sur les images cérébrales, et elle ne s’activait pas lors de l’apprentissage de comportements favorisant l’individu.
Cela suggère que le sgACC est particulièrement sensible au contrôle et à la régulation de la générosité.
Fait intéressant, l’équipe a également constaté que le sgACC n’était pas également actif dans tous les cerveaux scannés. Ceux qui rapportaient des niveaux plus élevés d’empathie présentent une activation accrue, tandis que ceux qui peinent à activer cette région se considèrent comme moins empathiques.
Bien que des études antérieures aient souligné certaines zones du cerveau liées à l’empathie et au comportement prosocial, cette étude apporte un nouveau niveau de spécificité.
« C’est la première fois qu’un processus cérébral particulier a été démontré pour l’apprentissage des comportements prosociaux, établissant un lien potentiel entre l’empathie et l’apprentissage pour aider autrui, » précise Dr. Lockwood.
En comprenant le fonctionnement du cerveau lorsque nous agissons pour les autres, ainsi que les différences interpersonnelles dans cette capacité, nous sommes mieux équipés pour appréhender ce qui ne va pas chez ceux dont les conditions psychologiques sont marquées par un mépris antisocial pour autrui.
Ces résultats sont non seulement captivants en eux-mêmes, mais ils ouvrent également des perspectives pour de futures interventions psychiatriques. Étant donné que certains troubles mentaux sont liés à une perte ou un manque d’empathie, identifier les régions cérébrales affectées pourrait guider le développement de traitements médicamenteux plus ciblés.
Par ailleurs, des études récentes montrent que des substances comme l’acétaminophène pourraient influencer l’empathie. En effet, des recherches ont suggéré que ce médicament, fréquemment utilisé pour soulager la douleur, pourrait également réduire la capacité d’empathie, ce qui soulève des questions intéressantes sur son utilisation dans le cadre de la santé mentale.
Ainsi, l’étude des mécanismes cérébraux de l’empathie pourrait non seulement enrichir notre compréhension des relations humaines, mais également révolutionner notre approche des troubles psychologiques.