Le lien entre le syndrome de fatigue chronique et l’inflammation

Le syndrome de fatigue chronique, ou encéphalomyélite myalgique, a longtemps été au cœur de controverses. Les spécialistes ont eu du mal à comprendre ses causes et à établir des traitements efficaces. Cependant, une étude récente offre de nouvelles perspectives, suggérant que cette maladie pourrait avoir des racines inflammatoires.

Femme fatiguée au lit, représentant le syndrome de fatigue chronique

Le syndrome de fatigue chronique (SCF), aussi connu sous le nom d’encéphalomyélite myalgique (EM), est une maladie complexe qui perturbe la vie de millions de personnes. Ce syndrome se caractérise par une fatigue extrême et invalidante, souvent accompagnée de douleurs corporelles et de difficultés de concentration. Selon les Centers for Disease Control and Prevention (CDC), entre 836 000 et 2,5 millions de personnes aux États-Unis en souffrent.

Il est alarmant de noter qu’environ 90 % des cas de SCF/EM restent non diagnostiqués. Cela s’explique en partie par un manque de sensibilisation et de compréhension de la maladie parmi les professionnels de santé, ce qui complique encore davantage le parcours de soins des patients.

Les recherches sur les causes du syndrome de fatigue chronique et sur les stratégies pour atténuer ses symptômes sont en cours. Les chercheurs s’efforcent sans relâche de découvrir de nouvelles informations qui pourraient éclairer la compréhension de cette maladie débilitante.

Une étude récente menée par l’École de médecine de l’Université Stanford en Californie a établi un lien entre le SCF/EM et des cytokines, des molécules essentielles dans la signalisation cellulaire qui jouent un rôle crucial dans la réponse immunitaire.

« Les résultats montrent que le SCF/EM est inflammatoire »

Le Dr Jose Montoya, auteur principal de l’étude, et ses collègues ont publié leurs résultats, révélant que la concentration de cytokines dans le sang pourrait être un indicateur significatif de la gravité des symptômes du SCF/EM.

L’étude a découvert que des variations de 17 cytokines étaient corrélées à la sévérité des symptômes chez les patients, soutenant ainsi l’hypothèse que le SCF/EM pourrait être fondamentalement une maladie inflammatoire.

« Il y a eu beaucoup de controverse autour du SCF/EM. Nos résultats montrent clairement qu’il s’agit d’une maladie inflammatoire et ouvrent la voie à un éventuel test sanguin diagnostique, » affirme le Dr Mark Davis, co-auteur de l’étude.

Les patients atteints de SCF/EM peuvent également présenter des symptômes ressemblant à ceux de la grippe, tels qu’un mal de gorge, des ganglions lymphatiques sensibles et des sueurs nocturnes, ainsi que des douleurs musculaires, des troubles digestifs et un « brouillard cérébral », qui se manifeste par des difficultés de concentration.

Étant donné qu’aucun remède n’est actuellement disponible pour cette maladie, le traitement se concentre généralement sur la gestion des symptômes. Les patients présentant des signes d’inflammation sont souvent traités avec des antiviraux, des anti-inflammatoires ou des médicaments immunomodulateurs.

Ces traitements sont parfois efficaces pour atténuer les symptômes, bien qu’aucun agent infectieux n’ait été identifié comme cause sous-jacente. Néanmoins, les traitements symptomatiques intermittents ont incité le Dr Montoya à examiner le rôle de l’inflammation dans le SCF/EM.

Analyse de la gravité de la maladie : des perspectives prometteuses

Au Centre de surveillance immunologique humaine de Stanford, le Dr Montoya et ses collègues ont analysé des échantillons de sang de 192 patients atteints de SCF/EM et de 392 participants en bonne santé.

Tous les participants avaient une moyenne d’âge de 50 ans, et ceux diagnostiqués avaient vécu avec leurs symptômes pendant plus de 10 ans en moyenne. L’étude a examiné non seulement la gravité des symptômes, mais aussi la durée de la maladie.

Les chercheurs ont observé que les participants atteints de formes légères de SCF/EM avaient des taux de cytokines plus bas que ceux du groupe témoin, tandis que ceux souffrant de formes plus sévères de la maladie présentaient des niveaux élevés de cytokines.

Le Dr Montoya indique que ces résultats pourraient suggérer une prédisposition génétique variable à la maladie, en fonction de sa gravité.

« Il est possible que l’analyse de la gravité ou de la durée de la maladie offre de nouvelles perspectives sur certaines pathologies humaines, » propose-t-il.

Les patients atteints de SCF/EM ont également montré des niveaux élevés d’une protéine impliquée dans la prolifération cellulaire, le facteur de croissance transformant bêta. En outre, une autre cytokine, la résistine, souvent liée à l’insulino-résistance, était également présente à des niveaux accrus chez ces patients.

Sur les 51 cytokines évaluées, seules 17 ont montré des niveaux significativement différents entre les groupes, et 13 d’entre elles sont connues pour leur rôle pro-inflammatoire.

Les cytokines pro-inflammatoires : un rôle déterminant

Bien que le facteur de croissance transformant bêta soit généralement considéré comme anti-inflammatoire, il peut également favoriser l’inflammation dans certains contextes, notamment dans certaines formes de cancer.

Étant donné que les personnes atteintes de SCF/EM présentent un risque accru de développer un lymphome, une forme de cancer du système lymphatique, le Dr Montoya suggère qu’il pourrait exister un lien entre les niveaux élevés de ce facteur et la circulation sanguine chez les patients.

Une autre cytokine pro-inflammatoire, la leptine, qui joue un rôle majeur dans la régulation de l’appétit, a également été corrélée aux formes sévères du SCF/EM. Il est intéressant de noter que les femmes tendent à avoir des niveaux de leptine plus élevés que les hommes, ce qui pourrait expliquer pourquoi cette maladie est plus souvent diagnostiquée chez elles.

Le Dr Montoya et son équipe espèrent que ces découvertes ouvriront la voie à des recherches plus approfondies sur les causes du SCF/EM et, à long terme, permettront le développement de traitements plus efficaces et ciblés pour cette maladie complexe.

Perspectives de recherche future

À l’avenir, il sera crucial d’explorer davantage les mécanismes sous-jacents du SCF/EM, en particulier le rôle des cytokines dans la pathophysiologie de la maladie. Les chercheurs doivent également se pencher sur les facteurs environnementaux et génétiques qui pourraient influencer la susceptibilité à cette condition. En combinant des approches cliniques et biologiques, il est possible d’identifier des biomarqueurs qui pourraient faciliter un diagnostic précoce et un traitement individualisé.

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