Les Bienfaits de l’Aspirine à Long Terme pour la Prévention du Cancer

Des recherches antérieures ont lié l’utilisation de l’aspirine à long terme aux effets secondaires indésirables, tels que les saignements internes. Cependant, une nouvelle étude révèle que les avantages d’une thérapie prolongée à l’aspirine surpassent ces risques; elle pourrait réduire de manière significative le risque de cancers majeurs du tube digestif, notamment les cancers de l’estomac, de l’intestin et de l’œsophage.

Illustration des bienfaits de l'aspirine pour la santé

L’équipe de recherche, dirigée par le professeur Jack Cuzick, directeur du Centre for Cancer Prevention de l’Université Queen Mary de Londres, a récemment publié ses conclusions dans une revue scientifique renommée.

L’aspirine, également connue sous le nom d’acide acétylsalicylique (AAS), est un médicament salicylate largement utilisé pour soulager les douleurs mineures, l’inflammation et la fièvre. À faibles doses et sur le long terme, ce médicament est également prescrit comme antiplaquettaire pour les patients à haut risque de crise cardiaque ou d’accident vasculaire cérébral.

Le débat sur les bénéfices de l’aspirine à long terme est particulièrement vivant. Certaines études antérieures ont suggéré qu’elle peut diminuer le risque de cancer de l’ovaire et améliorer la survie des patients atteints de cancer colorectal, tandis que d’autres mettent en garde contre des effets délétères, comme le risque accru de dégénérescence maculaire liée à l’âge.

Dans cette récente recherche, le professeur Cuzick et son équipe ont cherché à évaluer si les avantages pour la santé associés à l’utilisation continue de l’aspirine l’emportent sur les risques encourus.

Prendre de l’aspirine quotidiennement : essentiel pour réduire le risque de cancer

Pour arriver à leurs conclusions, les chercheurs ont réalisé une analyse exhaustive de toutes les preuves disponibles provenant d’une série d’études portant sur les effets bénéfiques et néfastes de l’aspirine.

Ils ont estimé que si les personnes âgées de 50 à 65 ans prenaient une dose quotidienne d’aspirine de 75 à 100 mg pendant 5 à 10 ans, le nombre de cas de cancer du côlon pourrait diminuer de 35% et les décès de 40%. De même, les cancers de l’estomac et de l’œsophage pourraient être réduits de 30%, avec une baisse des décès allant de 35 à 50%.

Dans l’ensemble, l’utilisation quotidienne d’aspirine pendant 5 à 10 ans pourrait entraîner une réduction de 9% des cas de cancers, d’accidents vasculaires cérébraux et de crises cardiaques chez les hommes, et de 7% chez les femmes. Sur une période de 20 ans, les chercheurs estiment que cela pourrait réduire le nombre de décès toutes causes confondues de 4%. Notons qu’aucun bénéfice n’a été observé avant trois années d’utilisation.

Cependant, les chercheurs soulignent que l’utilisation continue d’aspirine augmente le risque de saignements dans le tube digestif. Ils ont noté que les personnes de 60 ans prenant de l’aspirine tous les jours pendant 10 ans voyaient leur risque de saignement gastro-intestinal passer de 2,2% à 3,6%, soit une augmentation de 1,4%. Cela dit, seulement environ 5% des personnes risquent que cela soit fatal.

« Le risque de saignement dépend de plusieurs facteurs que les patients doivent prendre en compte avant de commencer un traitement régulier à l’aspirine. Il est conseillé de consulter un médecin avant de débuter une telle thérapie quotidienne », souligne le professeur Cuzick.

De plus, il a été observé que l’utilisation continue d’aspirine augmente le risque d’ulcère gastro-duodénal de 30 à 60%.

Malgré ces effets indésirables, le professeur Cuzick reste convaincu que la thérapie à long terme par l’aspirine pourrait jouer un rôle crucial dans la prévention du cancer :

« Il est connu depuis longtemps que l’aspirine — l’un des médicaments les plus abordables et courants — peut offrir une protection contre certains types de cancer. Pourtant, jusqu’à notre étude, qui a analysé toutes les preuves disponibles, il n’était pas évident que les avantages l’emportent sur les inconvénients. »

Bien que les effets secondaires graves ne doivent pas être négligés, prendre de l’aspirine quotidiennement semble être une des mesures les plus importantes que nous puissions entreprendre pour réduire le risque de cancer, après avoir arrêté de fumer et géré l’obésité.

L’équipe conclut qu’il est crucial de mener davantage de recherches pour identifier les personnes les plus susceptibles de bénéficier d’une utilisation prolongée de l’aspirine, tout en déterminant celles qui présentent le plus de risques de saignement gastro-intestinal.

Plus tôt cette année, un rapport de la Food and Drug Administration (FDA) a indiqué que bien que l’utilisation quotidienne à faible dose d’aspirine puisse prévenir des crises cardiaques ou des AVC chez des personnes ayant déjà eu un événement, les preuves demeurent insuffisantes pour justifier son utilisation préventive contre une première crise cardiaque ou un AVC.

État des lieux et perspectives de recherche pour 2024

À l’horizon 2024, les études sur l’aspirine continuent d’évoluer. Des recherches récentes indiquent que l’aspirine pourrait jouer un rôle dans la modulation du microbiome intestinal, ce qui pourrait avoir des implications significatives pour la prévention du cancer. Une étude parue cette année a montré que l’aspirine à faible dose pourrait influencer positivement la composition bactérienne de l’intestin, un facteur de plus en plus reconnu dans la lutte contre le cancer colorectal.

De plus, les chercheurs examinent les mécanismes biologiques sous-jacents à ces effets protecteurs, avec des études suggérant que l’aspirine pourrait réduire l’inflammation chronique, un facteur de risque bien connu pour plusieurs types de cancer. Les résultats préliminaires montrent des promesses, mais des essais cliniques supplémentaires sont nécessaires pour confirmer ces hypothèses.

En outre, des analyses récentes mettent en lumière l’importance de personnaliser le traitement à l’aspirine. L’identification des biomarqueurs permettant de déterminer qui bénéficiera le plus de cette thérapie pourrait transformer notre approche de la prévention du cancer, rendant les traitements plus ciblés et efficaces.

Ainsi, alors que l’aspirine continue d’être un sujet de débat, les recherches à venir pourraient bien définir de nouvelles recommandations pour son utilisation dans la prévention du cancer, en tenant compte des risques et des bénéfices spécifiques aux différents groupes de patients.

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