Un Nouvel Opioïde Prometteur : Efficace Comme la Morphine

Les opioïdes figurent parmi les analgésiques les plus fréquemment prescrits aux États-Unis, mais leur utilisation est assombrie par des conséquences tragiques : chaque jour, 78 Américains perdent la vie à cause d’une overdose. Toutefois, une avancée scientifique pourrait bien changer la donne. Des chercheurs ont mis au point une version plus sûre de ce médicament, qui pourrait significativement diminuer le nombre de surdoses et lutter contre la dépendance.

Nouvel opioïde prometteur contre la douleur sans effets secondaires graves.

Dans une étude récemment publiée, les scientifiques expliquent comment ils ont réussi à déchiffrer la structure atomique du « récepteur de la morphine » dans le cerveau. Cette découverte a permis de concevoir un composé médicamenteux capable de bloquer la douleur aussi efficacement que la morphine, mais sans les effets secondaires indésirables.

De plus, l’équipe de recherche souligne que, contrairement aux opioïdes traditionnels, ce nouveau composé n’active pas la région de récompense du cerveau, ce qui pourrait réduire le risque de dépendance.

Les opioïdes sont généralement utilisés pour traiter des douleurs modérées à sévères. Ils agissent en se liant à des protéines appelées récepteurs opioïdes, ce qui atténue la perception de la douleur.

Les opioïdes les plus courants incluent l’hydrocodone (Vicodin), l’oxycodone (OxyContin, Percocet) et la morphine (Kadian, Avinza).

Entre 1999 et 2014, selon les Centers for Disease Control and Prevention (CDC), les ventes d’opioïdes sur ordonnance ont presque quadruplé aux États-Unis. Étonnamment, durant la même période, la douleur rapportée par les Américains n’a pas connu d’augmentation.

Cette montée des ventes a été accompagnée d’une flambée des décès liés aux opioïdes, avec près d’un demi-million de décès enregistrés entre 2000 et 2014. Cette situation a suscité de vives inquiétudes parmi les professionnels de santé, et plus tôt cette année, le CDC a publié de nouvelles directives sur la prescription afin de répondre à ce qui est désormais qualifié d’« épidémie d’opioïdes ».

Mais cette nouvelle étude pourrait-elle offrir une solution pour s’attaquer à cette crise à sa racine ?

Créer un nouvel opioïde à partir de zéro

Malgré les dangers associés aux opioïdes, leur efficacité pour soulager les douleurs sévères est indéniable. « La morphine a révolutionné la médecine », souligne Brian Shoichet, Ph.D., co-auteur principal et professeur à l’École de pharmacie de l’Université de Californie à San Francisco (UCSF).

« Grâce à elle, de nombreuses procédures médicales sont désormais possibles, car nous savons que nous pouvons gérer la douleur par la suite, mais cela comporte également des risques considérables. » Depuis des décennies, la recherche d’un substitut plus sûr aux opioïdes traditionnels est en cours.

Comme l’indique Shoichet, les scientifiques ont tenté par le passé de modifier la structure de la morphine pour éliminer ses effets secondaires tout en préservant ses propriétés analgésiques. Cependant, l’équipe de la nouvelle étude a choisi une approche différente : utiliser les données sur la structure du récepteur mu-opioïde du cerveau pour concevoir un nouvel opioïde.

Le Dr Brian Koblika, un chercheur chevronné de l’École de médecine de l’Université Stanford, a déchiffré la structure atomique de ce récepteur en 2012.

« Avec les méthodes traditionnelles de découverte de médicaments, on est souvent contraint par un ensemble limité de produits chimiques », explique Shoichet. « Mais en partant de la structure du récepteur ciblé, on peut élargir ses horizons et envisager des possibilités inédites. »

PZM21 : une molécule prometteuse sans effets indésirables

Pour leur étude, les chercheurs ont intégré les données structurelles du récepteur mu-opioïde avec une technique de modélisation informatique appelée « amarrage moléculaire ». Cela a permis à l’équipe de mener environ 4 billions de simulations, évaluant comment plus de 3 millions de molécules pouvaient interagir avec le récepteur et activer ses fonctions.

Les chercheurs ont spécifiquement recherché des molécules capables de se lier au récepteur et d’activer la signalisation des protéines G pour atténuer la douleur, sans pour autant activer la bêta-arrestine2, une protéine impliquée dans les problèmes respiratoires et la constipation souvent liés aux opioïdes.

Au terme de leurs recherches, 23 molécules prometteuses ont été identifiées, et en multipliant par 1000 l’efficacité chimique de ces molécules, le candidat le plus prometteur, nommé PZM21, a été sélectionné.

Les tests en laboratoire et sur des modèles murins ont révélé que PZM21 était capable de cibler le récepteur mu-opioïde pour réduire la signalisation de la douleur avec une efficacité comparable à celle de la morphine, mais sans entraîner de problèmes respiratoires ni de constipation.

De plus, il a été observé que cette molécule ciblait principalement les circuits opioïdes du cerveau pour soulager la douleur, avec un impact minimal sur les récepteurs opioïdes de la moelle épinière. Selon l’équipe, aucune autre molécule opioïde n’a montré une telle spécificité.

Moins de comportement addictif observé

Les expériences sur les souris ont révélé que PZM21 n’activait pas les voies dopaminergiques du cerveau, responsables des systèmes de récompense qui peuvent entraîner la dépendance. Dans les tests comportementaux, il a été constaté que les souris ne passaient pas plus de temps dans les espaces où elles avaient reçu PZM21, ce qui aurait été le cas si elles avaient développé une dépendance.

« Nous n’avons pas encore prouvé que PZM21 est complètement non-addictif », précise Shoichet. « À ce stade, nous avons seulement démontré que les souris ne semblent pas motivées à rechercher la molécule. »

Bien que des recherches supplémentaires soient nécessaires pour évaluer l’innocuité et l’efficacité de PZM21 chez les humains, ainsi que son potentiel à réduire la dépendance, les chercheurs estiment être en bonne voie pour développer un médicament capable de lutter contre l’épidémie d’opioïdes.

Les conclusions de l’équipe sont claires :

« Contrairement à la morphine, PZM21 se montre plus efficace pour la composante affective de l’analgésie, sans provoquer de dépression respiratoire ni d’effet de renforcement typique des opioïdes à des doses équianalgiques. PZM21 représente donc à la fois une avancée pour comprendre la signalisation des récepteurs opioïdes et une piste thérapeutique dépourvue des nombreux effets indésirables associés aux opioïdes actuels. »

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