Une nouvelle recherche chez la souris identifie une gamme de neurones susceptibles de jouer un rôle clé dans la promotion du sommeil. Ces résultats pourraient transformer les pratiques thérapeutiques pour le traitement des troubles du sommeil.
L’insomnie touche environ 60 millions de personnes aux États-Unis chaque année. Ce problème est associé à une multitude de complications de santé, en particulier chez les personnes âgées, y compris les troubles cognitifs et le syndrome métabolique.
Comme le sait quiconque a passé une nuit blanche, essayer de « vouloir » s’endormir pendant un épisode d’insomnie est non seulement vain, mais cela peut également aggraver la situation. Mais que se passerait-il s’il existait un « interrupteur » dans notre cerveau que nous pourrions activer lorsque nous souhaitons nous endormir ?
Une nouvelle étude semble avoir mis en lumière un tel « interrupteur » au sein d’un type de neurone. Après avoir passé en revue les recherches existantes, des scientifiques de l’école de médecine de l’université Johns Hopkins à Baltimore ont constaté que, bien que de nombreuses études aient été menées sur les neurones favorisant l’éveil, peu se sont concentrées sur ceux qui favorisent le sommeil.
Ainsi, les scientifiques – dirigés par Seth Blackshaw, Ph.D., professeur de neurosciences à l’École de médecine de l’Université Johns Hopkins – ont entrepris d’explorer le rôle des cellules cérébrales exprimant un gène spécifique appelé « Lhx6 ».
Ce gène particulier est crucial dans la formation de neurones qui inhibent l’activité d’autres neurones. Des recherches antérieures menées par le professeur Blackshaw ont déjà mis en évidence le rôle de ce gène chez la souris.
Il explique la motivation de l’étude en déclarant : « Nous savons que les cellules d’autres régions du cerveau utilisent le Lhx6 et que ce gène est vital pour le développement correct de ces zones. Par exemple, perturber l’expression de Lhx6 peut entraîner de nombreuses maladies, dont l’épilepsie. »
Les chercheurs se sont donc demandé si les neurones exprimant le gène Lhx6 favorisent le sommeil en « désactivant » d’autres neurones qui nous maintiennent éveillés.
Le premier auteur de l’étude, Kai Liu, un étudiant diplômé au sein du département de neurosciences Solomon H. Snyder à l’École de médecine de l’Université Johns Hopkins, a vu ses résultats publiés dans la revue
Les neurones exprimant Lhx6 induisent le sommeil
Liu et son équipe ont développé un modèle de souris dans lequel ils ont utilisé des « récepteurs conçus exclusivement activés par des médicaments de synthèse » pour analyser si l’activation des neurones exprimant Lhx6 favoriserait ou inhiberait le sommeil.
Ils ont employé le clozapine N-oxyde pour activer ces neurones, ainsi que la protéine Fos et des techniques de traçage viral pour étudier le comportement neuronal.
Liu et son équipe ont découvert que les souris dormaient davantage et passaient plus de temps à la fois en sommeil paradoxal (REM) et en sommeil non REM au cours des 12 heures suivant l’injection du médicament. Ces effets étaient à leur maximum entre 2 et 8 heures après l’administration du médicament.
En gros, le sommeil non paradoxal inclut une phase de sommeil profond et réparateur, tandis que le sommeil paradoxal est perçu comme plus léger et est la phase pendant laquelle se produisent la plupart de nos rêves.
« Le fait que ces [neurones exprimant Lhx6] favorisent à la fois le sommeil paradoxal et le sommeil non paradoxal les distingue des autres cellules régulatrices du sommeil et ouvre de nouvelles cibles pour le traitement d’une large gamme de troubles du sommeil. »
Prof. Seth Blackshaw
De plus, les chercheurs ont observé cette activité dans une région du cerveau où les neurones exprimant Lhx6 n’avaient pas été identifiés auparavant : une région de l’hypothalamus appelée zona incerta.
« Étant donné que l’hypothalamus est un système ancien, relativement bien conservé au cours de l’évolution, du poisson à l’homme, comprendre sa génétique et sa chimie chez la souris devrait enrichir notre connaissance de ce qui se passe dans le cerveau humain », explique le professeur Blackshaw.
Des recherches antérieures ont identifié des neurones favorisant l’éveil en sécrétant de l’hypocrétine, un neuropeptide. Ainsi, dans cette nouvelle étude, les chercheurs ont également voulu déterminer si les neurones exprimant Lhx6 inhibaient ces neurones sécrétant de l’hypocrétine.
En bloquant l’action de l’hypocrétine avec des médicaments de synthèse et en activant les neurones exprimant le Lhx6, les chercheurs ont observé que les souris maintenaient un sommeil paradoxal accru, mais pas de sommeil non REM.
« Cela démontre que Lhx6 inhibe non seulement les cellules produisant de l’hypocrétine, mais aussi d’autres types de cellules activatrices », conclut Liu.
Nouvelles Perspectives de Recherche
À la lumière de ces découvertes, il est essentiel de continuer à explorer comment ces neurones peuvent être ciblés pour améliorer le traitement des troubles du sommeil. De nouvelles études devraient se concentrer sur la compréhension des mécanismes moléculaires sous-jacents à l’interaction entre Lhx6 et d’autres gènes impliqués dans la régulation du sommeil.
Les implications cliniques de cette recherche sont vastes. Par exemple, une meilleure compréhension de la façon dont ces neurones contrôlent le sommeil pourrait mener au développement de nouvelles thérapies médicamenteuses pour traiter l’insomnie et d’autres troubles du sommeil. Les chercheurs envisagent même de mettre au point des approches basées sur la stimulation cérébrale pour activer ces neurones, offrant ainsi une avenue prometteuse pour les patients souffrant de troubles du sommeil chroniques.
En conclusion, cette étude ouvre la voie à de nouvelles pistes de recherche qui pourraient révolutionner notre compréhension du sommeil et de ses dysfonctionnements. Le champ de la neurologie du sommeil est en pleine expansion, et ces découvertes pourraient bien être le début d’une nouvelle ère dans le traitement des troubles du sommeil.