Les chercheurs ont identifié une nouvelle cause d’ostéoporose dans les cellules sénescentes du corps. En ciblant ces cellules avec des médicaments anti-vieillissement, on pourrait révolutionner les approches thérapeutiques pour le traitement de la perte osseuse liée à l’âge.
Selon la National Osteoporosis Foundation (NOF), aux États-Unis, 10 millions de personnes souffrent d’ostéoporose, une affection où les os deviennent fragiles et susceptibles de se fracturer. On estime que 44 millions d’Américains présentent une faible densité osseuse.
De plus, le NOF souligne qu’environ la moitié de toutes les personnes âgées de 50 ans et plus «risquent de se fracturer un os et devraient se soucier de leur santé osseuse».
Des chercheurs de la Mayo Clinic à Rochester, Minnesota, ont découvert une nouvelle cause d’ostéoporose chez la souris. Le premier auteur de cette étude est Joshua N. Farr, du Centre Robert et Arlene Kogod sur le vieillissement et de la Division d’endocrinologie de la Mayo Clinic College of Medicine, et les résultats sont publiés dans la revue
Cibler les cellules sénescentes
Les cellules sénescentes du corps jouent un rôle clé dans le processus normal de vieillissement et dans diverses maladies associées. Dans cette nouvelle recherche, Farr et ses collègues ont mis en place plusieurs modèles murins de perte osseuse, avec des souris âgées de 20 à 22 mois – ce qui équivaut à plus de 70 ans chez les humains.
Les chercheurs ont abordé le ciblage de ces cellules par différentes méthodes. Ils ont « éteint » les gènes de ces cellules et les ont éliminées à l’aide de médicaments sénolytiques, conçus pour « tuer » les cellules sénescentes.
Enfin, ils ont utilisé un médicament inhibant l’activité d’un type d’enzymes appelé Janus kinase, pour bloquer la production d’une substance pro-inflammatoire sécrétée par ces cellules sénescentes.
Le Dr Sundeep Khosla, directeur du programme Aging Bone and Muscle au Centre Kogod sur le vieillissement de la Mayo Clinic, explique les résultats de l’étude : «Les effets des trois approches sur le vieillissement osseux étaient remarquablement similaires.
« Ils ont tous amélioré la masse osseuse et la force en réduisant la résorption osseuse tout en maintenant ou en augmentant la formation osseuse, ce qui est fondamentalement différent de tous les médicaments actuels contre l’ostéoporose. »
Certaines de ces approches ont aussi été testées sur des souris plus jeunes, âgées d’environ 12 mois. L’élimination génétique des cellules sénescentes et leur inhibition par des médicaments sénolytiques n’a montré aucun effet bénéfique sur la santé osseuse des jeunes souris, renforçant ainsi le lien de causalité entre les cellules sénescentes et l’ostéoporose liée à l’âge.
Les médicaments sénolytiques efficaces
Les médicaments sénolytiques utilisés dans cette étude étaient le dasatinib et la quercétine, administrés en association une fois par mois.
L’auteur principal, le Dr James Kirkland, Ph.D., directeur du Centre Kogod sur le vieillissement, commente les résultats : «Même si cette combinaison de médicaments sénolytiques n’était présente chez les souris que pendant quelques heures, elle a éliminé les cellules sénescentes avec un effet durable.
« C’est une preuve de plus en plus évidente que les médicaments sénolytiques ciblent les processus de vieillissement fondamentaux et pourraient être largement utilisés pour traiter plusieurs maladies chroniques », ajoute-t-il.
Les auteurs soulignent également les avantages d’une administration intermittente de cette combinaison de médicaments – c’est-à-dire à intervalles mensuels clairement définis – par rapport aux traitements contre l’ostéoporose actuellement disponibles, qui nécessitent une prise quotidienne et peuvent avoir des effets secondaires indésirables.
Le traitement actuel de l’ostéoporose, selon les auteurs, a un effet négatif significatif en ce sens qu’il diminue la résorption osseuse, ce qui entraîne une diminution de la formation osseuse. La résorption osseuse fait référence au processus naturel par lequel l’os est progressivement éliminé tout au long de sa vie, alors que de nouveaux os se forment.
Les médicaments sénolytiques utilisés de manière intermittente dans cette étude ont réduit la résorption osseuse tout en préservant la formation osseuse, et dans certains cas, l’ont même augmentée.
« Bien que nous sachions grâce à des recherches antérieures que l’accumulation de cellules sénescentes entraîne un dysfonctionnement des tissus, le rôle de la sénescence cellulaire dans l’ostéoporose était jusqu’à présent peu clair », explique le Dr Khosla.
« L’originalité de ce travail dans le domaine osseux réside dans le fait que, plutôt que de cibler une voie osseuse spécifique comme le font tous les traitements actuels de l’ostéoporose, nous avons ciblé un processus de vieillissement fondamental qui pourrait améliorer non seulement la masse osseuse, mais également d’autres conditions liées à l’âge en tant que groupe. »
Dr Sundeep Khosla
« Nous devons continuer à explorer ces interventions potentielles qui ciblent les mécanismes de vieillissement fondamentaux, dans l’espoir de réduire le fardeau des fractures et d’autres conditions telles que le dysfonctionnement cardiovasculaire, le diabète et la fragilité », conclut-il.
Perspectives récentes sur l’ostéoporose
Les recherches récentes ont montré une augmentation significative de la prévalence de l’ostéoporose, notamment chez les populations vieillissantes. Une étude de 2023 a révélé que le nombre de cas d’ostéoporose pourrait atteindre 5 millions de nouveaux cas par an d’ici 2030, d’où l’importance de ces nouvelles cibles médicamenteuses.
Les données recueillies à partir d’essais cliniques récents suggèrent également que l’approche sénolytique pourrait non seulement ralentir la progression de l’ostéoporose, mais également améliorer la qualité de vie des patients. En effet, des améliorations significatives de la densité minérale osseuse ont été observées dans des groupes traités avec ces médicaments.
Il est donc crucial de poursuivre les recherches dans ce domaine, en s’assurant que ces nouvelles thérapies soient non seulement efficaces, mais également sûres à long terme. Les avancées dans la compréhension des mécanismes de vieillissement pourraient ouvrir la voie à des traitements innovants qui pourraient transformer la prise en charge de l’ostéoporose et d’autres maladies liées à l’âge.