Selon les résultats d’une nouvelle étude menée par des chercheurs de l’Université de Melbourne en Australie, un médicament utilisé pour traiter l’alcoolisme – le disulfirame – pourrait nous rapprocher d’un remède contre le VIH.
Le professeur Sharon Lewin, responsable de l’étude, de l’Institut Peter Doherty pour l’infection et l’immunité à Melbourne, et ses collègues publient leurs résultats dans une revue scientifique de renom.
Le disulfirame (nom de marque Antabuse) est un médicament administré aux personnes souffrant d’un trouble lié à la consommation d’alcool pour les dissuader de boire. Ce médicament agit en bloquant une enzyme appelée déshydrogénase, essentielle au métabolisme de l’alcool.
L’inhibition de cette enzyme entraîne une sensibilité accrue à l’alcool; ainsi, les patients qui consomment de l’alcool tout en prenant du disulfirame ressentent divers effets secondaires désagréables, notamment des maux de tête, des nausées, des douleurs thoraciques, des vomissements, une faiblesse, une vision trouble, des sueurs et une confusion mentale.
Mais au-delà de son rôle dans le traitement de l’alcoolisme, le professeur Lewin et son équipe ont découvert que le disulfirame pourrait également jouer un rôle crucial dans la lutte contre l’une des maladies les plus graves et les plus difficiles à traiter au monde: le VIH.
Actuellement, la thérapie antirétrovirale (TAR) est le traitement principal contre le VIH, impliquant une combinaison d’au moins trois médicaments antirétroviraux qui ralentissent la progression de la maladie. Bien que ce traitement ait conduit à une réduction significative des taux de mortalité par VIH à l’échelle mondiale, il ne constitue pas un remède définitif.
En effet, le traitement antirétroviral ne parvient pas à éliminer totalement le VIH des patients, car le virus peut demeurer en dormance dans les cellules, échappant ainsi à l’attaque du système immunitaire.
Cependant, lors de leur essai clinique de phase 2, les chercheurs ont constaté que le disulfirame pouvait «réveiller» les cellules dormantes du VIH, permettant ainsi leur destruction – une approche «choc-mort» jugée essentielle pour venir à bout du virus.
Disulfiram : Une Révolution Potentielle dans le Traitement du VIH
De nombreuses études ont exploré cette approche. En septembre, par exemple, une recherche a suggéré qu’une classe de médicaments testés pour le traitement du cancer pourrait également activer les cellules dormantes du VIH.
Faits rapides sur le VIH aux États-Unis :
- Plus de 1,2 million de personnes aux États-Unis âgées de 13 ans et plus vivent avec le VIH.
- Environ 1 personne sur 8 séropositive aux États-Unis n’est pas au courant de son infection.
- Chaque année, environ 50 000 nouvelles infections à VIH sont recensées aux États-Unis.
Pour en savoir plus sur le VIH, il est crucial de poursuivre les recherches. Cependant, le professeur Lewin et ses collègues soulignent qu’à ce jour, les médicaments testés pour réveiller le VIH latent ont souvent entraîné des effets secondaires toxiques, constituant ainsi un obstacle majeur à l’avancement de l’approche choc-abattage.
Pour leur étude – réalisée en collaboration avec des chercheurs de l’Université de Californie à San Francisco – l’équipe a administré du disulfirame à 30 patients séropositifs aux États-Unis et en Australie, qui recevaient déjà un traitement antirétroviral.
Le disulfirame a été administré quotidiennement pendant trois jours. Les patients ont reçu 500 mg le premier jour, 1 000 mg le deuxième jour et 2 000 mg le troisième jour.
Les chercheurs ont constaté que la dose de 2 000 mg activait le VIH dormant dans les cellules des patients sans engendrer d’effets secondaires toxiques.
«La dose de disulfirame que nous avons utilisée a fourni plus de «chatouillement» que de «coup de pied» au virus, mais cela pourrait être suffisant», explique le professeur Lewin. « Bien que le médicament n’ait été administré que pendant trois jours, nous avons observé une augmentation significative du virus dans le plasma, ce qui est très prometteur. »
Le professeur Lewin ajoute :
« Cet essai démontre clairement que le disulfirame n’est pas toxique et est sans danger pour une utilisation, et pourrait très bien être le changeur de jeu dont nous avons besoin. »
Le principal auteur de l’étude, le Dr Julian Elliott, chef de la recherche clinique au département des maladies infectieuses de l’Université Monash et à l’hôpital Alfred en Australie, souligne que l’éveil du VIH dormant n’est que la première étape pour l’éliminer ; ils doivent maintenant trouver une méthode pour le détruire.
« C’est une étape cruciale car nous avons démontré que nous pouvions réveiller le virus endormi avec un médicament sûr, facilement administré par voie orale une fois par jour », ajoute-t-il. « Maintenant, nous devons trouver un moyen de nous débarrasser des cellules infectées. Un coup de pouce au système immunitaire pourrait s’avérer bénéfique. Nous avons encore beaucoup à apprendre sur la manière d’éradiquer ce virus particulièrement rusé. »
Récemment, il a été rapporté que la Food and Drug Administration des États-Unis (FDA) a approuvé un médicament à un seul comprimé appelé Genvoya pour le traitement du VIH.
Nouvelles Perspectives de Recherche
Au fil des dernières années, des études ont montré des avancées notables dans la recherche sur le VIH. Par exemple, des travaux récents ont mis en lumière l’importance de la thérapie génique et des approches immunologiques pour traiter le VIH à long terme. En 2024, des essais cliniques sur de nouvelles formulations de vaccins et des traitements combinés continuent d’apporter de l’espoir aux chercheurs et aux patients.
En conclusion, le disulfirame pourrait ouvrir des portes vers des traitements innovants contre le VIH. Les prochaines étapes, qui incluent des recherches approfondies et des essais cliniques, seront cruciales pour déterminer son efficacité et son application dans le cadre d’une stratégie de guérison. La lutte contre le VIH reste complexe, mais des perspectives prometteuses émergent grâce à des recherches comme celles du professeur Lewin et de son équipe.